Intérêt de la combinaison de méthodes dans l'étude clinique du fonctionnement psychique : l'exemple d'une étude sur le vécu subjectif de la précarité sociale - Université Sorbonne Paris Nord Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2015

Intérêt de la combinaison de méthodes dans l'étude clinique du fonctionnement psychique : l'exemple d'une étude sur le vécu subjectif de la précarité sociale

Résumé

Nous proposons d’exposer le processus méthodologique d’une recherche qualitative en psychologie, auprès d’individus en situation de précarité. Cette recherche propose des liens entre parcours de vie traumatogènes, logique psychique basée sur la survie et vécu subjectif de la situation sociale actuelle. Conçue à partir d’un positionnement épistémologique clinique et psychanalytique, cette recherche est tout d’abord basée sur une expérience de terrain de plusieurs années auprès de personnes en situation de précarité. Les tableaux cliniques de ces patients nous évoquent fréquemment des fonctionnements de type limites. Difficiles à saisir dans leur logique psychique, leur problématique questionne l’efficacité des interventions cliniques mais également des sociales. Ainsi, notre recherche part à la fois d’interrogations théoriques autour des fonctionnements limites, le statut de ceux-ci, leur possible origine traumatique mais encore d’interrogations plus pragmatiques afin d’adapter les interventions des professionnels autour de l’accompagnement de ces sujets. Pour engager cette recherche, il était nécessaire d’avoir une approche méthodologique capable de répondre à plusieurs objectifs : -Faire apparaître la subjectivité des sujets dans sa dimension consciente et inconsciente, en privilégiant leur récit de vie et leur regard sur les contextes sociaux dans lesquels ils vivent. -Etre en mesure de mettre le matériel en lien avec une réflexion sur la psychopathologie, sans passer de la position du chercheur à une position de soignant qui pose un diagnostic -Introduire une procédure d’interprétation qui favorise la conceptualisation et la mise en lien des concepts émergeants avec les théories existantes sur la précarité et le fonctionnement psychique de personnes en situation de précarité. Un protocole de trois entretiens semi-directifs a été élaboré. Il s’agissait d’interroger les personnes sur leur situation présente, leur vécu de la précarité, les possibles effets psychiques de celle-ci, mais également leur parcours de vie, leur perception d’eux-mêmes, des autres…Afin d’éloigner le risque d’influencer le matériel en occultant certaines dimensions ou bien en insistant trop sur d’autres et faire en sorte que chaque sujet soit interviewés de manière systématique sur les mêmes éléments, nous avons bâti ces entretiens en nous inspirant de l’outil diagnostique psychodynamique opérationnalisé, OPD-2 (Task force 2008). Cet outil nous a été utile sous deux aspects : multimodèle et multiaxial, il propose d’ouvrir toutes les dimensions de la personnalité des sujets mais il engage également le chercheur dans une progression des entretiens favorable à la relation interpersonnelle, à l’observation et à l’investigation psychique. L’utilisation de l’OPD-2 nous a donc permis d’organiser le matériel narratif, d’introduire un processus relationnel, tout en gardant la même structuration pour tous les sujets recrutés. Une fois les récits recueillis, il nous fallait les traiter et les comprendre en évitant les surinterprétations, les digressions psychanalytiques surchargées en théorie. Nous avons pour ces raisons, choisi d’utiliser la grounded theory (théorie ancrée) (GLASER et STRAUSS, 1967 et Corbin et Strauss 1990). Le processus de codage ouvert, nous a permis de solidifier l’ancrage dans le texte, de regarder la dimension manifeste au niveau psychologique et de contextualiser les données au niveau de la situation sociale des individus. La conceptualisation par catégorie nous a permis de regrouper des codes ouverts en fonction des propriétés qu’ils partagent. Ces catégories se complètent jusqu’à saturation, s’enrichissent, se complexifient. Elles forment, au final, une première analyse de type phénoménologique. La mise en articulation de ces catégories conceptualisantes correspond à un second niveau d’analyse, cette fois clinique, où apparaissent les vignettes de chacun des sujets recrutés, les effets contre-transférentiels du chercheur dans ces relations avec eux comme avec la recherche, son interprétation de leur parcours de vie, de leur logique psychique, de leur mode relationnel. L’utilisation de la méthode complémentariste proposée par G. Devereux (1967) nous a, en outre, permis, à ce niveau de la recherche, l’utilisation de notions et de concepts issus de champs théoriques. Dans notre exposé, nous allons discuter les implications épistémologiques d’une telle combinaison et argumenter qu’il est tout à fait intéressant d’introduire une démarche conceptualisante dans la tradition de la théorie ancrée dans une étude clinique d’orientation psychanalytique. La place de la démarche psychanalytique ne se réduit pas aux références théoriques, mais elle implique une approche méthodologique qui donne accès à la dimension inconsciente du matériel et de la relation chercheur-sujets interviewés.
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Dates et versions

halshs-01352762 , version 1 (09-08-2016)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-01352762 , version 1

Citer

Sophie Fierdepied, Gesine Sturm, Thierry Baubet. Intérêt de la combinaison de méthodes dans l'étude clinique du fonctionnement psychique : l'exemple d'une étude sur le vécu subjectif de la précarité sociale . 5 ième colloque RIFReQ (Réseau International Francophone de Recherche Qualitative) Prudence empirique et risque interprétatif, université Paul Valéry de Montpellier, Jun 2015, montpellier, France. ⟨halshs-01352762⟩
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